Conso… lamentum

Souvent, quand je papote tard le soir en revenant du boulot, on me demande ce qui peut bien me mettre dans cet état de fatigue avancé.
 
En gros mon boulot est de m’assurer que nos filiales transmettent bien leur données financières (bilan, compte de résultat, etc.), afin qu’on les consolide, c’est-à-dire qu’on les additione (même si c’est un peu plus compliqué que ça), et enfin, celà permet de produire ce qu’on appelle la liasse consolidée qui est la somme des sous que nous ont rapportée (ou coutée) nos chère filiales.
 
Pour ce faire on utilise SAP.  SAP est un progiciel, c’est à dire comme un logiciel mais en plus gros, et plus cher.  Beaucoup plus cher !  Pour faire une comparaison SAP est au vêtement ce que la robe de mariage de feu Lady Diana est au Jeans T shirt, ou ce que le porte-container est à la camionette de livraison.  Sauf que la plupart du temps on plutôt besoin d’une camionette de livraison qu’un supertanker.  Seulement voilà, si on invente aux bosses que le supertanker peut faire camionette et que ça fait faire des économies de coûts de transports, le croiriez vous si je vous dit que les bosses diront "Ha mais bien sûr !  Vite livrons nos pizza par cargo".  Par "on", il faut entendre : des consultants SAP surpayés -pleonasme-, les mêmes qui ont si bien conseillé Enron ou WorldCom.
 
En fait, la comparaison avec un cargo n’est pas la mieux choisie.  En effet, un cargo est pensé du début jusqu’à la fin pour accomplir une mission spécifique : transporter des marchandises sur les océans.  SAP n’est pas conçu comme ça.  C’est un peu comme si vous achetiez un cargo qui peut transporter des marchandises sur les océans, avec option transport sur chemin de fer ou option mobylette, ou option transport de passagers ou fast-food pour martien.  Tout SAP est organisé autour de modules.  SAP est friand de modules, comme le belge de frites (spécial dédicace à mes collègues français).  Sous SAP, ils sont connus comme FI, CO, ECCS, SEM BCP, SEM BPS, BW. Petit jeu : ami lecteur, essaye de trouver à quoi correspondent ces différents sigles.  Bien sûr, on ne peut pas penser à tout, et les modules ne seront jamais totalement adapté au business.  Bref, c’est acheter son cargo avec un tube de colle et un kit pot ninja.
 
Bien entendu, cette lourdeur demande des serveurs dédiés, gérés par une grosse équipe d’informaticiens dédiée, avec un service informatique (crache par terre) dédié.
 
J’ai oublié de préciser que SAP est un progiciel Allemand, dont la société est basée à Waldorf, et que notre service SAP est lui situé à Frankfort.  Imaginez donc la flexibilité que vous obtiendrez dès lors qu’il s’agit de faire le moindre changement…  En fait, il faut le faire sur une machine de développement, tester, faire une demande de transport sur la machine de pré-production, retester, finalement faire une demande de transport sur la machine de production retester, et prier pour que le transport se soit effectué sans problème (ça n’arrive jamais), ensuite rester jusque 22h pour savoir pourquoi ça merde et qu’est-ce que a bien pu se passer.  Pour finalement s’apercevoir que 1) l’utilisateur a fait une connerie 2) le transport n’a pas été fait correctement 3) le consultant a fait une bourde qu’il a balayé sous le tapis, mais en oublier de la reporter sur la machine de développement 4) SAP a émis un correctif qui a été appliqué sans que personne ne soit prévenu, surtout pas moi 5)  Les droits n’ont pas été correctement étabils 6) j’ai pas le temps d’énumérer toutes les causes possibles de problèmes lié à SAP, je ne doit avoir que 2 Gb de disque dispo.
 
Bref, voilà un petit aperçu de ce que je vis, pardon de ce que je subis quotidiennement à mon boulot.  Pour ajouter à celà, SAP est plus fermé qu’une huitre hors de la période des fêtes, que pour faire une modification il faut connaître ABAP qui est le langage de SAP, et qui est un mix entre COBOL, FORTRAN et PL/1.  Que bien sûr il est interdit de môdifier la moindre ligne de code si on est pas dûment autorisé, enfin bref, qu’on a pas le moindre début de contrôle sur cette machine de Rube Goldberg.
 
Et encore !  Dans un autre post, je parlerais peut-être, si je ne me jette pas par la fenêtre de désespoit avant, des merveilleux outils que notre merveilleux service informatique met à notre disposition tels : Lotus Notes, et des PC Dells avec autant de couches de protections que l’image la plus appropriée serait un type qui porte deux pantalons, une ceinture, des bretelles, un caleçon blindé et des couches culottes.  C’est sûr qu’avec ça on risque pas de se retrouver le cul à l’air, mais c’est quand même pas pratique pour faire son boulot quotidien.
 
Sur ce je te laisse, on vient de m’annoncer que les chiffres doivent être changé.  A plus.
 
P.S.
Le titre conso… lamentum est un (subtil) jeu de mot sur les lamentations de la conso(lidation).  Le consolamentum était aussi un sacrement administré par les cathares qui correspondait plus ou moins à un bapteme.  C’est quand même plus classieux comme titre que "sévices informatique".
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10 commentaires pour Conso… lamentum

  1. Stéphane dit :

    Ha haaaa, maintenant je sais que tu es à la trésorerie…  Ca réduit ma short list.  Des histoires de SAP, je peux en taper à la pelle tant ce logiciel a fait grincer des dents.  Je raconterais un jour la mise en place de SAP à Paris dans un grand groupe cimentier.

  2. Stéphane dit :

    C\’est ironique j\’espère ?  SAP convivial ?  Avec cette interface de m… on on ne peut pas faire un copier-coller valable ?  Où on ne peut rien scripter (sauf a avoir suivi une formation à 1Gz € (Gz ne veut pas dire Gigaherz ici, mais gazillion) ?  Peut-être que SAP trouve sa place dans des business nouvellement créés comme SFR, où il est facile de s\’adapter au moule SAP.  Je pense aussi que les modules FI/CO, si ils sont bien implémentés dans un milieu homogène (pas par exemple dans des boîtes ou chaque filiale a un plan comptable différent), mais pour le reste, et SURTOUT en conso ou chaque cas est un cas particulier, avec des règles IFRS qui changent tous les 6 mois, où il important d\’avoir les données en temps et en heure avec des filiales qui se font parfois tirer l\’oreille, SAP est d\’une lourdeur pachydermique !
    Pour te donner une idée, si on veut ajouter une ligne dans le plan comptable, il faut : ajouter le nouveau compte dans la hiérarchie BCS, ensuite ajouter cette ligne dans le module de saisie BPS, ensuite mettre à jour l\’interface web, ensuite vérifier que les regles de validation ne sont pas touchées, ensuite mettre à jour les tables de l\’interface bcs bps, ensuite transporter le tout sur la machine de préproduction, ensuite tester le bastringe, ensuite transporter le tout sur la machine de production, ensuite modifier les états de reportings qui se font dans BW.  Eventuellement mettre à jour l\’interface entre WINS et SAP, ou avec les ventes.  Bien entendu dans ce processus, il y a bien 15 personnes impliquées qui sont éventuellement en vacances, débordées ou que sais-je, ou bien qui sont en conflit avec la hierarchie et qui veulent défendre leur pré carré.  Sachant également que la comptabilité vient souvent nous dire qu\’il faut cette nouvelle ligne au beau milieu de la conso.
    Ha, au fait, il n\’y a pas que LAfarge comme grand groupe cimentier à Paris, mais eux d\’après ce que je sais, ils utilisent Hyperion pour la conso 🙂

  3. Unknown dit :

    Je n\’ai jamais dit que SAP était convivial (Comment pourrait-il l\’être d\’ailleurs ?), mais qu\’il était bien conçu et, facile d\’accès. il faut reconnaître que je n\’ai  jusqu\’à présent utilisé que les modules FI et TRSY et, que les concepteurs d\’ SAP étaient des financiers (ça aide). Et puis merde, il n\’y a pas que la Conso dans la vie. Si tes chiffres ont un peu de retard, il ne va pas te bouffer le père Kiener, même s\’il profère parfois des injures tonitruantes dans son bureau. Au fait, chez Ciments français, ils sont très contents d\’ SAP.
     
     

  4. Stéphane dit :

    Bon, je vais éviter de parler à nouveau de SAP, sinon ça va encore faire monter ma pression artérielle 🙂  Mais dans tous les départements de conso, tout ce qui compte, c\’est d\’avoir les chiffres de plus en plus vite.  Et bien sûr pour compliquer un peu les choses, on en demande de plus en plus 🙂 Mais forcément les infos, c\’est comme la bouffe, si on mange beaucoup et vite, on a une indigestion, et ça génère un gros paquet de m…

  5. Unknown dit :

    Effectivement, c\’est la maladie du siècle. Le fait de vouloir faire remonter l\’information de plus en plus vite, on a appelé cela le Reporting. il y a 30 ans, on faisait un bilan tous les ans, puis il a fallu faire des arrêtés de comptes trimestriels, puis mensuels, à quand les bilans journaliers ? Seulement voilà, tu peux regarder 20 fois par jour dans ton portefeuille, tu n\’auras pas plus d\’argent pour autant. Mais va faire comprendre ça à un CEO ou un CFO.

  6. Unknown dit :

    Bon à part ça, rien de neuf ? T\’es en vacances ? j\’te vois plus au 907.

  7. Stéphane dit :

    non, je suis toujours au 907, on fait l\’aménagement de mon nouveau bureau 🙂

  8. Unknown dit :

    C\’est quoi ton nouveau bureau, au 3e étage ?….. Non je plaisante.

  9. GUIDAULT dit :

    Curieux, nous on a toujours réussi à éviter SAP. Mais bon, dans les hautes sphères (jette un coup d\’oeil vers Paris), le travail de sappe a déjà pas mal commencé.D\’un autre point de vue, nous n\’avons que des progiciels (quoi que leur donner ce nom là est un peu exagéré) tellement bien fait que plus personnes quasiment ne sait les maintenir. Courage quand même…

  10. Stéphane dit :

    Mais rien ne peut être pire que SAP !  Même une suite de progiciel, tournant l\’un sur un AS/400, l\’autre sous UNiX, voire le troisième sous un réseau de PC.  Rien ne peut être pire qu\’SAP.

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